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Le Parc national de la Bénoué et sa zone périphérique est un espace à enjeux multiples. En effet, les terres y sont arables et les ressources faunistiques nombreuses et variées. De plus, les vastes pâturages que compte la zone ne font qu’accroitre son intérêt pour les acteurs nationaux et étrangers. Cette réalité de la zone fait en sorte qu’elle soit soumise à de nombreuses contraintes comme le braconnage et les empiètements des espaces de conservation par la création des villages dans les espaces de conservation, l’agriculture, la récolte anarchique des espèces végétales utiles à l’épanouissement des populations et des animaux, l’orpaillage clandestin, l’occupation des zones de conservation par le bétail.
Dans ce contexte, l’illicéité est favorisée par les pratiques de corruption qui y prend plusieurs formes. C’est la raison pour laquelle le projet EcoNorCam, a réalisé une étude portant sur « l’évaluation des risques et pratiques de corruption dans la gestion des ressources et des terres dans la région du Nord ». Cette étude a mis en exergue de nombreux défis formulés sous forme de recommandations dont l’adressage de la plupart implique l’adoption et la mise en œuvre d’une stratégie participative.
Cette approche dénommée Stratégie d’Accompagnement au Changement (SAC) a pour ambition d’améliorer la gouvernance dans la gestion des ressources naturelles et des terres, en réduisant de manière considérable l’un des principaux maux qui minent ce secteur : la corruption.
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Photo de famille des participants
Le consortium d’organisations en charge de ce projet, conscient de l’impérieuse nécessité de mutualiser les efforts pour espérer tordre le cou à ce fléau quasi systémique, a convié une dizaine d’organisations de la société civile, parmi lesquelles GREDEVEL, à un atelier de mobilisation autour de cette stratégie, tenu ce 26 juillet 2022 à Garoua. Ces organisations triées sur le volet sur la base de leurs interventions auprès des communautés autour du Parc national de le Bénoué, ont toutes adhéré à la démarche proposée pour la mise en œuvre de la SAC. Elles se sont aussi engagées à participer activement à ses mécanismes de pérennisation.
Démarche de mise en œuvre de la stratégie (SAC)
La Stratégie d’Accompagnement au Changement est formulée sur un modèle de changement comprenant les trois étapes ci-après :
- La décristallisation ou la motivation au changement : correspond à l'abandon des comportements et des attitudes habituelles. Elle s'accompagne d'une motivation à changer. Cela se fera par les actions de sensibilisation, des actions de mobilisation des acteurs positifs (préalablement identifiés), plaidoyers, production des outils d’accompagnement au changement, etc.
- L’apprentissage au changement : c’est la deuxième phase du processus. On s'initie à de nouveaux modes de fonctionnement. On expérimente de nouvelles façons de faire et d’être. Cela se fera par les actions de plaidoyer, d’utilisation des outils d’accompagnement des changements et la réduction de la vulnérabilité des parties prenantes, etc.
- La recristallisation : Elle consiste à rendre permanent un nouveau champ de forces et à stabiliser le nouvel équilibre atteint. Ici, les principales actions à mener sont celles liées à la résistance aux mauvaises pratiques (actions de promotion de la tolérance 0 aux mauvaises pratiques), à l’isolation des acteurs négatifs, la mise en œuvre des actions de sanctions des acteurs négatifs (procès, dénonciations, etc.).
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En définitive, il sera question pour cette stratégie de s’appuyer sur le petit noyau constitué de la dizaine d’organisations de la société civile mobilisées et qualifiés d’acteurs positifs, pour parvenir à déconstruire des paradigmes négatifs et de reconstruire des paradigmes positifs, pour une meilleure gouvernance des ressources naturelles. Concrètement, il s’agira du renforcement de l’intégrité à travers des actions d’opposition à la corruption à petite échelle, dans le but de les étendre progressivement et créer ainsi une masse critique d’acteurs intègres capables de résister à la corruption.
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Garantie de pérennisation de la stratégie
Au sortir de la rencontre de mobilisation des acteurs, les différentes OSC représentées ont mis sur pied une plateforme de collaboration pour garantir non seulement la pleine réussite de la SAC mais aussi pour assurer sa pérennité.
En plus d’être un cadre d’échange d’informations entre différentes organisations partenaires, cette plateforme permettra aussi la mutualisation des efforts, le partage d’expériences positives et négatives et le renforcement mutuel des capacités.
Un plan d’action pour la mise en œuvre de la SAC est également prévu et les activités une fois réalisées permettront à coup sûr d’apporter une contribution significative dans l’amélioration de la gouvernance des ressources naturelles et des terres dans la région du Nord. Un modèle qui pourra être dupliqué aux deux autres régions septentrionales qui font face elles aussi aux défis de la sécurisation des aires protégées.
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Réactions de quelques participants à cet atelier du 26 juillet à Garoua.
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 GUISSATA Bonné,
Chef de projet EcoNorCam
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« L’activité organisée aujourd’hui, rentre dans la logique de la contribution à l’amélioration de la gouvernance qui est un des objectifs chers au projet EcoNorCam. Elle fait suite à une étude qui a été réalisée il y a de cela presque un an, dont les résultats ont été restitués à un certain nombre d’acteurs clés de la région du Nord, qui ont donné leur avis pour enrichir les résultats. Il était question aujourd’hui de mobiliser un certain nombre d’acteurs qui pensent avoir des choses à apporter pour pouvoir améliorer la gestion des ressources naturelles et des terres dans cette région. C’est donc l’objectif de cette réunion qui a regroupé une dizaine d’OSC qui interviennent au niveau local, c’est-à -dire au niveau de la région et qui ont presque la même vision notamment apporter leur touche, leur contribution à une amélioration de la gestion durable de nos ressources et des terres. C’est donc dans cet esprit-là que nous avons organisé cette réunion d’information et de mobilisation des acteurs que nous qualifions de positifs, appelés à influencer les acteurs négatifs ou acteurs à conquérir, pour pouvoir rallier la majorité à la cause de l’amélioration de la gouvernance des ressources naturelles ».
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Angeline Louise LOKUMU,
Coordinatrice des programmes à Action pour le Développement Communautaire (ADC)
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« Cet atelier sur la stratégie d’accompagnement au changement intervient à point nommé parce qu’en réalité nous avons besoin d’initiative qui vont avoir de l’impact dans notre secteur d’activité. Et justement, à travers les actions de sensibilisation et de plaidoyer qui sont prévues et aussi grâce au travail avec les communautés, cette stratégie va permettre véritablement de commencer un processus de changement des mentalités et des comportements qui vont finalement permettre de réduire la corruption à long terme, notamment avec le moyen de pérennisation qu’est la plateforme mise en place. Le problème de corruption dans la gouvernance des ressources naturelles autour du Parc et également sur l’ensemble du territoire de la région va être réduit et notre souhait c’est que ce phénomène soit complètement éradiqué ».
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